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Le Blog de Cristau de Hauguernes
22 août 2017

Escapade à Beaucaire sur Baise, le 20 août 2017

beaucaire-03

Adishatz,

Alors que le mois a négocié imperturbablement le grand virage fatidique du 15 août, c'est par une fraîcheur insolite que j'ai pris à l'aube la route qui me conduisait vers le village de Beaucaire sur Baïse dans le Gers, où réside un collègue autant que grand ami, le pittoresque et humaniste Jean-Jacques Dutaut-Boué.

Seul l'habitat signale réellement l'entrée dans le département de d'Artagnan, tant les paysages verdoyants entre Arzacq, Garlin, et Riscle se ressemblent, alternant de larges fonds de vallées où le maïs domine avec plus ou moins de bonheur et des côtes boisées où quelques hêtres pyrénéens échappés de la Bigorre voisine se mêlent aux chênes, châtaigniers et bouleaux. Tandis qu'à l'approche d'Aignan et au delà le maïs disputé par les vignobles de Saint Mont, est détrôné par le tournesol qui se fond tant bien que mal dans des paysages jaune paille où des arbres généralement plus modestes accusent un climat plus sec.

Ce qui surprend le béarnais en transit dans la campagne gersoise est la grande visibilité que favorise l'amplitude du relief, la disparition des haies, l'ostracisation des bois au profit des cultures quand nos coteaux sont étriqués, en patte d'oie, dominant des vallées encaissées, à l'exception des plaines alluviales des gaves, et que seules les lignes de crêtes offrent un panorama satisfaisant car dominant les bois qui y sont plus nombreux et de plus en plus étendus. On comprend l'avantage pour les seigneurs et les grands paysans de faire construire en hauteur.

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L'arrivée à Beaucaire sur Baïse s'opère par une route départementale en voie nord-sud, offrant une interminable ligne droite continue dans la vallée de ce cours d'eau pyrénéen. Le village se trouve presqu'à mi-chemin entre Saint Jean Poudge et Condom, tout au nord du département.

Le temps d'un repas digne de ce nom, cette visite à l'ami Jean Jacques fournit un formidable prétexte à randonner dans les environs du village, rompant la relative monotonie de la desserte qui y conduit.

À la traversée de la Baïse le randonneur est saisi d'un contraste, la verdeur des abords immédiats de la rivière entretenue par la végétation typique des ripisylves, frênes, aulnes et peupliers, permet sur quelques dizaines de mètres une flore luxuriante tandis qu'un peu plus loin l'été a tout brûlé. Faut-il s'étonner que quelques maisons fort anciennes soient venues chercher la fraîcheur miraculeuse de ce liseré, tandis que d'imposants bâtiments désaffectés rappellent l'utilisation de l'eau par une forge et quelques moulins près de l'écluse.

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L'agriculture domine, si l'on peut dire outrageusement, les paysages que nous traversons entre Beaucaire et Ayguetinte, mais il en est de même sur l'autre rive et à perte de vue. Pour sa survie l'homme a mis en culture tout ce qui pouvait être rentabilisé jusqu'à raboter le moindre centimètre carré de terre. Seules les citadelles calcaires qui coiffent les hauteurs sont restées imprenables car moins opportunes sur le plan des cultures et c'est là que de denses forêts de petits chênes et arbustes ont trouvé asile. Il en résulte une impression d'aridité certaine qu'avive le climat de cette fin d'été 2017, d'immenses champs de tournesol un peu à la peine et des prairies rôties, des vignobles aux ceps robustes et aux raisins gonflés de tonus, en ces terres de Floc de Gascogne, le tout relié par des chemins poussiérieux bordés de rares arbustes à l'agonie qui communiquent entre de belles fermes dispersées et qui tentent de se protéger de la chaleur en se ceignant d'arbres.

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On est un peu surpris en apercevant les ruines d'un moulin à vent au sommet d'un dôme tandis qu'à l'opposé sur un autre promontoire, un bâtiment très ancien, dont l'existence est attestée au Moyen Âge, évoque de fait l'architecture romaine...

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Les prairies et les chênaies calcaires que nous gagnons à la force des mollets sont d'un grand intérêt sur le plan botanique. Les chênes sont de petite taille et se pressent à la manière d'une fûtée. Pourtant tout indique qu'ils sont très âgés. De nombreux pieds de fenouil et d'origan (plus petits que ceux que l'on observe en Béarn) goûtent la compagnie de ces arbres qui prêtent leur ombre à d'innombrables arbustes, viornes flexibles, cornouillers sanguins, pruneliers, troënes, ifs. Des espèces méditerranéennes se mêlent aux atlantiques et on devine que ces écosystèmes sont extrêmement favorables aux orchidées dont on aperçoit quelques hampes desséchées du dernier printemps. C'est dans ces conditions qu'au détour d'un chemin nous sont apparues quelques pieds de cyclamens de Naples, cyclamen hederifolium, vision d'autant plus ravissante et inattendue que la grande saison des fleurs touche à sa fin et que partout ailleurs tout est exsangue. D'autres stations de ce cyclamen se signaleront un peu partout dans la chênaie.

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La déambulation dans ces bois de coteaux est d'autant plus agréable qu'il y fait particulièrement bon après une ascension sous un soleil écrasant. Et il ne faut pas chercher plus loin pourquoi quelques belles demeures seigneuriales ou grosses fermes dont certaines arborent fièrement un pigeonnier ont préféré s'immerger dans ces sylves. Près de l'une d'elle nous admirons un chêne colossal dont l'envergure contraste en tout point avec la modestie de ses congénères, tandis que dans la vallée de l'Auloue en contrebas nous apercevons la localité de Castera-Verduzan et dans le lointain, en arrière-plan, le château de Lavardens.

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Alors que le soleil décline à l'horizon nous rentrons par les chemins de Beaucaire, mus par la perspective de quelque boisson désaltérante car sitôt que l'on s'éloigne de la Baïse, de ses affluents et des rares sources, l'eau est ce qui manque le plus cruellement à ces paysages et à leurs habitants. L'occasion m'est donnée ici de préciser que la pluviométrie moyenne annuelle du département du Gers décline très fortement d'ouest en est et des confins de Lannemezan à ceux de l'Agenais jusqu'à s'abaisser vers les 500 mm aux portes du Toulousain, ce qui est plus de deux fois inférieur à celle des Pyrénées Atlantiques, laquelle ne s'abaisse sous les 1000 mm que sur une parcelle infinitésimale à l'extrême nord-est du département.

Un grand merci à mon acolyte Jean Jacques dont les connaissances minutieuses du terroir ont nourri cette nouvelle "escapade".

Adishatz !

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